Nous sommes le 26/06/2022 et il est 04h44 TU+2 - "L'Eglise attend de vous tous un puissant secours dans sa détresse" (Eugène de Mazenod, 1823)
Fidélité à mon engagement religieux, preuve d'amour pour le Christ
Retraite annuelle SSTEJK - Juillet/Août 2009 - Kinshasa
(jb musumbi)
Introduction
Jour 1. Bousculer mon image religieuse
- Méditation : Ps 139
- 1. Fidélité et notre monde
- 2. Redynamiser la vie chrétienne
Jour 2. Etre une religieuse responsable
- Méditation : Lc 24, 13-35
- 1. Défi d'une expérience de Dieu
- 2. Mission avant tout spirituelle
Jour 3. Fidélité au célibat charismatique
- Méditation : Mt 5, 13-16
1. Chasteté joyeuse
- 2. Quand naît une amitié privilégiée
Jour 4. Fidélité à la pauvreté libératrice
- Méditation : Mc 6, 30-44
- 1. Pauvreté au service des pauvres
- 2. Pauvreté et famille africaine
Jour 5. Fidélité à l'obéissance religieuse
- Méditation : Mc 12, 28b-34
- 1. Obéissance comme démarche personnelle
- 2. Volonté de Dieu
Jour 6. Communauté source de fidélité
- Méditation : Col 3. 12-18
- 1. Sens spirituel et religieux de la communauté
- 2. Lieu d'intersubjectivité et de croissance
Jour 7. Etre des signes efficaces d'espérance
- Méditation : Jn 15, 5-12
- 1. Signe et espérance
- 2. Répondre aux attentes de l'Eglise (VC 109)
Jour 8. Vers une nouvelle prise de conscience
- Méditation : Lc 15, 11-32
- 1. Défi d'une éducation aux vertus humaines
- 2. Vivre en femme réconciliée
Introduction
« Que cherchez-vous ? » (Jean 1, 38)
a) Compréhension
- « Fidélité à mon engagement religieux, preuve d'amour pour le Christ », tel est le thème qui m'a été suggéré pour ce ressourcement spirituel.
- En l'abordant, je me suis posé une question essentielle : quelle est la meilleure stratégie pour être davantage fidèle à mon engagement religieux ?
- Ma réponse est à la fois simple et provocatrice : Bousculer mon image religieuse dans l'aujourd'hui du monde.
- Voilà le sous-thème de notre retraite qui se veut être une invitation à la conversion personnelle pour mieux aimer, mieux servir et mieux témoigner.
- Entendons par ‘bousculer', la capacité d'apporter un changement complet dans son style de vie et d'inciter à aller plus vite.
- Et par « image » au figuré : « ce qui reproduit, imite ou évoque quelqu'un, quelque chose; représentation mentale d'un être ou d'une chose »[1].
- Disposons-nous à vivre cette retraite en répondant d'abord à ces 2 questions : 1) Comment allez-vous ? 2) « Que cherchez-vous ? » (Jn 1, 38)
b) Entrée fructueuse en retraite
- Puisque chacune se présente au Seigneur telle qu'elle est, la meilleure attitude dès le début est de se regarder et de se situer pour mieux s'orienter.
- Physiquement, es-tu en forme ? Comment va ta santé ?
- Emotionnellement, quels sont tes soucis ? Y a-t-il quelque chose qui te ronge intérieurement ou dérange ton épanouissement religieux ? (alcool, obsession sexuelle, autres tendances égoïstes?).
- Et comment es-tu spirituellement ? Arrives-tu à bien prier ? Quelle est la source de tes dispersions ? Que combats-tu actuellement pour être en harmonie avec le Seigneur ? Quels sont tes tensions internes, tes faiblesses et tes points forts ?
- Le secret d'une bonne retraite étant l'honnêteté devant le Seigneur, il convient d'appeler le chat par son nom.
- Après ce regard sur toi-même, essaie de répondre à la question que Jésus pose aux deux disciples de Jean-Baptiste : « que cherchez-vous ? »
- Quelle grâce spéciale demandes-tu au Seigneur ?
- Si possible, mettre tes réponses par écrit pour toi-même, afin d'être en mesure de faire une évaluation personnelle à la fin de la retraite.
c) Dynamique
- Dans ce partage, je me laisserai guider par l'esprit des SSTEJK. « L'Institut a pour fin générale la gloire de Dieu et la sanctification de ses membres » (c4).
- Chaque jour un texte de méditation guidera notre prière et une question d'approfondissement à la fin de chacun des entretiens aidera à mieux réfléchir.
- Tout cela n'est possible qu'en se mortifiant par le silence intérieur et extérieur.
- Chaque soir nous prierons avec la parole de Dieu devant le saint sacrement.
- Vers la fin de la retraite, chacune aura la possibilité de vivre le sacrement de réconciliation et de faire l'évaluation de la retraite.
- «Tendre vers la sainteté, voilà en bref le programme de toute vie consacrée… Le point de départ de ce programme se trouve dans le fait de tout quitter pour le Christ.» (VC, 93)
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1. Bousculer mon image religieuse
Méditation : Psaume 139
1.1. Fidélité et notre monde
a) Monde
- L'authenticité d'un choix de vie dépend, entre autres, du monde dans lequel nous vivons, ou mieux de notre contexte socioculturel.
- Ce monde créé par Dieu est celui dans lequel nous sommes envoyés pour être témoins du Christ. « Comme tu m'as envoyé dans le monde, moi aussi, je les ai envoyés dans le monde » (Jn 17, 18).
- Ce monde est aussi à éviter. « N'aimez ni monde ni ce qui est dans le monde. Si quelqu'un aime le monde, l'amour du Père n'est pas en lui. Car tout ce qui est dans le monde – la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l'orgueil de la richesse – vient non pas du Père, mais du monde » (1Jn 2, 15-16).
- Le monde d'aujourd'hui est un monde tiraillé où les gens donnent l'impression d'être sur un bateau sans direction ; un monde dont les changements font douter de la vertu de fidélité[2].
b) Fidélité
- La fidélité est communément tenue pour être une grande vertu.
- La fidélité, c'est quand l'amour est plus fort que l'instinct (Paul Carvel).
- La fidélité est avant tout une question d'amour (Suzanne Ratelle-Desnoyers).
- Synonyme de fidélité : constance, persévérance, résolution, assiduité, obstination, énergie, volonté, régularité, opiniâtreté, permanence, stabilité, durabilité, fiabilité, dévouement, abnégation, sacrifice, désintéressement, détachement, conscience, loyauté, zèle, soin, amour, culte, dévotion.
- Définition de la fidélité : Qualité de celui qui est fidèle, attaché à ses devoirs, à ses engagements. La fidélité à ses serments. Exactitude, vérité, sincérité. La fidélité d'un historien, d'un récit. Il se dit de la mémoire retenant bien et exactement. La fidelity de la memo ire, des souvenirs.
- Bref, Fidélité signifie : dévouement sans faille, attachement profond et jamais démenti, le fait de ne pas trahir son engagement.
c) Signification
- La fidélité en soi n'existe pas! Elle n'a de sens qu'en rapport avec un engagement ou un choix de vie notamment le mariage ou les vœux de religion dans l'Eglise.
- Dans une Afrique ‘assoiffée de fécondité' et ‘malade d'elle-même', il pourrait paraître absurde d'insister sur la fidélité aux vœux de chasteté, pauvreté et obéissance quand on sait que la vraie preuve de l'amour envers le Christ est d'écouter Dieu, de l'aimer et d'aimer son prochain comme soi-même.
- Pour les religieuses, les vœux sont un moyen de parachever l'amour.
- Il vaut la peine de se laisser bousculer par la parole de Dieu et de s'ouvrir à l'Amour par l'amour, dans un élan de sincère conversion permanente.
- C'est dire aujourd'hui combien les chrétiens ont besoin de trouver en elles (religieuses) des personnes «dociles à l'action de l'Esprit Saint, qui marchent allégrement, fidèles au charisme de leur vocation et de leur mission», disait Jean-Paul II dans l'Exhortation apostolique post-synodale ‘Vita Consecrata' (n. 109).
1e Question d'approfondissement :
Dans quelle mesure ta vocation est-elle un choix libre et responsable ?
1.2. Redynamiser la vie chrétienne
a) Compréhension de l'état religieux
- Répondre à un appel divin. En d'autres termes, "on entre dans la vie religieuse par vocation, cela veut dire que ce n'est pas par choix personnel, mais parce qu'on a reconnu y être appelé"[3].
- Consécration baptismale et une vie chrétienne vécue sous la forme surnaturelle de l'existence, c'est-à-dire se donner soi-même au Christ et à son Père (LG 44 PC 5).
- Exercer plus librement et intensément la charité. La pratique externe (vœux) ne vaudrait rien si elle n'est pas l'expression d'un amour plus total et plus généreux.
- Dans cette situation engageante, la redynamisation de la vie chrétienne est une vibrante invitation à acquérir une mentalité de foi et à prendre conscience des exigences de son baptême, à s'intégrer activement à la communauté ecclésiale et à intégrer foi chrétienne et vie quotidienne[4].
b) Acquérir une mentalité de foi
- La vocation est une affaire complexe. Celle externe se vérifie par des critères objectifs, tandis que celle interne est difficile à repérer. Elle se reconnaît par l'esprit de foi, l'engagement d'amour et l'esprit de sacrifice.
- Cela correspond aux exigences du Christ. « Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il se renie lui-même, qu'il se charge de sa croix, et qu'il me suive » (Mc 8, 34).
- Cela correspond aussi aux vœux de chasteté, pauvreté et obéissance.
- Dans ce tableau précis se joue la carte de fidélité religieuse : renoncement, croix, suite – chasteté, pauvreté, obéissance – amour, sacrifice, foi.
- Sans la foi, pas d'harmonie et pas de fidélité non plus.
- Et la foi, selon la lettre aux Hébreux (11, 1), est «une manière de posséder déjà ce qu'on espère, un moyen de connaître des réalités qu'on ne voit pas.»
- La foi a une double caractéristique. Elle est la racine de notre vie spirituelle, puisque sans elle nous ne pouvons plaire à Dieu (He 11, 6). Et elle est la condition permanente de la vie spirituelle.
- Seule la Parole de Dieu accueillie et mise en œuvre produit en nous une mentalité de foi, c'est-à-dire «la capacité d'interpréter les réalités selon la pensée du Christ, et de trouver dans la doctrine révélée des valeurs et des motifs inspirateurs de vie.»
- Acquérir une mentalité de foi suppose un élan constant de conversion personnelle.
c) Conversion personnelle
- Conversion préliminaire: passer de la non-foi à la foi.
- Première conversion: quand la personne décide de considérer toute sa vie à la lumière de la foi.
- Seconde conversion par laquelle la personne se soumet totalement à l'action de Dieu et se propose de suivre toujours l'inspiration divine.
- Aussi la notion de conversion se rapproche-t-elle à celle du commencement de la vie spirituelle, le moment "où la personne humaine se considère responsable de sa vie devant Dieu, c'est-à-dire lorsque la relation à Dieu devient une relation totale de personne à personne"[5].
- En d'autres termes, toute vie chrétienne remonte au baptême; mais la vie spirituelle chrétienne personnelle ne commence que par sa prise de conscience et par un ferme engagement dans l'Église.
d) Prendre conscience des exigences de son baptême
- Vie nouvelle dans l'Esprit (Jn 3, 5) qui implique l'abandon du vieil homme.
- Intégration au Corps du Christ jusqu'à former avec lui un seul être (1 Co 12, 12-13) ; cela implique une transformation dans le Christ parce qu'on est aimé, choisi et consacré par Dieu (Rm 13, 13-14).
- Introduction dans la communauté ecclésiale prophétique. Cela implique de marcher dans l'Esprit en agissant par amour et en ne se laissant pas conditionner par les tendances égoïstes de la nature (Gal 5, 13-18).
- Bref, les trois effets du baptême sont l'appartenance à la vie divine, l'unité dans le corps du Christ et participation active et responsable à la mission de l'Eglise.
e) Sens de responsabilité
- Le sens de responsabilité d'une religieuse se vérifie dans sa capacité de vivre une vie consacrée authentique.
- Cela ne signifie pas qu'elle la vive sans difficulté ni combats, sans blessures ni défaites, mais parce qu'elle l'harmonise avec son être, son projet.
- Choisir la vie consacrée avec responsabilité suppose trois conditions: avoir la maturité psychologique et affective; avoir une sérieuse expérience de Dieu; avoir une connaissance normale et suffisante de ce qu'on choisit[6].
- L'effort intellectuel est indispensable pour la compréhension de ses propres engagements dans l'Eglise.
- Bref, l'esprit de foi se vérifie par la capacité d'être attentif aux signes des temps et aux appels de Dieu qui sont contenus dans les événements de la vie.
2e Question d'approfondissement :
Que peux-tu faire davantage pour améliorer ton image religieuse dans ton milieu de vie ou de travail ?
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2. Etre une religieuse responsable
Méditation : Luc 24, 13-35
2.1. Défi d'une expérience de Dieu
a) Consécration
- • De par sa consécration, la religieuse est appelée à une triple mission : aimer, servir et témoigner.
- La fidélité à son engagement signifie surtout fidélité à cette triple mission.
- Par essence, "consacrer" (rendu sacré, saint, oint) est un acte réservé à Dieu et à sa libre initiative. Dieu appelle et met à part une personne ou un groupe de son choix.
- Ainsi, établie dans une relation privilégiée, la personne s'efforce désormais pour Celui à qui elle appartient.
- De fait, au fond de la notion de consécration se trouve celle d'appartenance stricte à Dieu en vue de son service d'amour[7].
- Dans la Constitution dogmatique Lumen Gentium, le Concile Vatican II utilise le terme consécration dans le sens constant de "donation intégrale de soi".
- La consécration religieuse exige une vie réellement consacrée dans la liberté et l'amour intense en acte et en vérité.
- Aussi la consécration est-elle vécue comme une "sequela Christi" qui s'exprime en un triple amour: suivre le Christ chaste, pauvre et obéissant.
- Par ce dépouillement, la personne consacrée a tout donné au Seigneur à qui elle appartient; elle ne dispose plus de sa vie comme elle le veut.
- Comme dit Cantalamessa, “nous ne nous appartenons plus, nous appartenons au Seigneur; c'est pourquoi nous ne pouvons plus disposer de notre corps selon notre bon vouloir, pour une satisfaction qui est une fin en soi. Cela est une profanation du temple de Dieu, c'est une “désacralisation”, le contraire exact de la consécration”.
b) Témoin
- “L'homme contemporain croit plus les témoins que les maîtres, l'expérience que la doctrine, la vie et les faits que les théories” (RM, 42).
- Le concept de consécration se comprend mieux dans son lien avec celui de témoin.
- Dans le christianisme le témoin atteste par sa vie que le Christ est venu et il est ressuscité.
- En effet, le témoin est la personne qui a fait l'expérience de Dieu.
- Le témoin a été bouleversé par cette expérience et il sent le besoin irrésistible d'annoncer son expérience de Dieu aux autres;
- il réussit avec une puissance humainement inexplicable à bouleverser et à susciter la conversion des autres, l'adhésion à la foi chrétienne.
- Témoin fidèle par excellence, fondement de toute consécration, Jésus est venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité (Jn 18, 37).
- En effet, il témoigne de ce qu'il a vu et entendu auprès du Père (Jn 3, 32), et il témoigne de ce qu'il est lui-même: la lumière du monde (Jn 8, 12-14).
c) Notion d'expérience de Dieu
- Qui oserait s'engager dans la vie consacrée dite vie mystique sans désirer vivre l'union à Dieu?
- La rencontre est tellement merveilleuse, béatifiante et même séduisante que la personne qui en fait l'expérience en sort bien enrichie au point qu'elle ne peut la garder pour soi-même.
- Il n'y a d'authentique rencontre avec Jésus que là où l'on accepte, après coup, de l'annoncer.
- Ainsi Philippe à Nathanaël : “Celui de qui il est écrit dans la loi de Moïse et dans les prophètes, nous l'avons trouvé” (Jn 1, 45).
- Et la Samaritaine aux gens de son village: “Venez donc voir un homme qui m'a dit tout ce que j'ai fait” (Jn 4, 29).
- Le chrétien authentique est la personne convertie, qui ne se contente pas uniquement de l'éducation inculquée, mais qui est capable de décision personnelle pour le Christ, qui sait faire le don personnel de soi au Christ.
- Selon Mülhen, en effet, “tu deviens chrétien d'une manière tout à fait décisive et en dernière analyse seulement par la conversion personnelle au Christ et par l'expérience de sa présence réelle dans la vie”[8].
- Dans cette optique l'expérience de Dieu se conçoit comme une connaissance en raison d'une rencontre personnelle, comme l'exprime si bien Job : “Je ne te connaissais que par ouï-dire, maintenant, mes yeux t'ont vu” (42, 5).
- Somme toute, l'expérience de Dieu ou expérience spirituelle est liée aux verbes ENTENDRE et VOIR. On ajouterait même TEMOIGNER.
- S. Jean le dit : “Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l'annonçons, à vous aussi, afin que vous aussi, vous soyez en communion avec nous” (1 Jn 1, 3).
3e Question d'approfondissement
Par la profession religieuse la sœur « proclame sa volonté d'appartenir entièrement à Dieu et de Lui vouer l'amour le plus complet » (c12). Où en es-tu ?
2.2. Mission avant tout spirituelle
a) Mission
- La personne consacrée, redisons-le, est par essence celle qui aime Dieu et le prochain, qui sert et témoigne.
- Le témoignage personnel est le moyen par lequel la personne consacrée remplit sa mission spirituelle.
- "La mission, en effet, avant de se caractériser par les œuvres extérieures, consiste à rendre présent au monde le Christ lui-même par le témoignage personnel" (VC 72) - Une façon d'être que d'agir.
b) Bases et conditions d'un choix libre et responsable : disciples d'Emmaüs
- La table leur fait oublier la route, celle qui vient de Jérusalem et qui en quatre étapes conduit les disciples à la certitude que Jésus est Ressuscité.
- C'est d'abord l'information qu'en chemin ils donnent à leur compagnon qui est venu les rejoindre. Au passé, car tout est bien fini, c'est la désillusion la plus complète ! Et ils tournent le dos à Jérusalem.
- Leur foi est éteinte. Heureusement, Jésus a l'initiative de la Rencontre.
- Alors Jésus leur explique les Ecritures et donne la clé : « Ne fallait-il pas que le Christ souffrit pour entrer dans sa gloire ? Et Il leur expliqua dans toute l'Ecriture ce qui le concernait. » La foi naît au contact de la Parole de Dieu.
- Et c'est le repas, le pain rompu qui leur rappelle d'autres partages : la multiplication des pains..... et aussi le dernier repas où Il a livré son Corps, la veille de sa mort. La foi se nourrit de l'Eucharistie.
- Dans la joie de la Rencontre de Jésus, ils rejoignent en toute hâte la communauté pour annoncer la Merveille : « Le Seigneur est Vivant » Et tous répondent : « C'est vrai Il est Ressuscité ». La foi se communique et porte témoignage.
c) Dynamique formative
- La disponibilité à croître : « Deux disciples faisaient route vers un village… » (v13).
- Une formation personnelle et guidée (ad personam) : « Jésus en personne s'approcha et il faisait route avec eux » (v15).
- Aider à découvrir ses limites, l'incapacité de réaliser ses rêves : « Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître » (v16).
- La connaissance de soi, de ses motivations : « Quels sont ces propos que vous échangez en marchant ? » (v17).
- Les attentes irréalistes, les illusions : « Nous espérions… » (v21)
- Nécessité d'une catéchèse approfondie, l'écoute de la parole de Dieu : « Ne fallait-il pas que… » (v26-7).
- Faire l'expérience de l'absence : loi du cheminement spirituel : « Quand ils furent près du village où ils se rendaient, il fit semblant d'aller plus loin » (v28).
- Faire naître le choix : le désir d'être avec Jésus : « Mais ils le pressèrent en disant : reste avec nous, car le soir tombe et le jour déjà touche à son terme » (v29).
- L'expérience charismatique spécifique : « Et il advint comme ils étaient à table avec eux, qu'il prit le pain, dit la bénédiction, puis le rompit et le leur donna. Leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent » (v30-31).
- Fin, but de la formation : se reconnaître soi-même dans l'image du Christ : « Leurs yeux s'ouvrirent et ils le reconnurent » (v31).
4e Question d'approfondissement
« Elle se laisse séduire par Dieu, et à l'amour, elle veut répondre par l'amour » (c9). Quelle est ton expérience de Dieu ?
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3. Fidélité au célibat charismatique
Méditation : Mt 5, 13-16
3.1. Chasteté joyeuse
a) Compréhension terminologique
- Est chaste l'individu qui vit sa vie psychosexuelle de manière juste suivant les exigences de son état ou charisme. Et comme tous sont appelés à la perfection, tous doivent être parfaitement chastes, ce qui ne signifie pas célibataires.
- Il y a deux types de célibat. Le célibat négatif est fondé sur le caractère incomplet ou sur la répression de l'expression sexuelle, tandis que le célibat positif est caractérisé par une sécurité affective, une forte activité intellectuelle ou professionnelle et une particulière consécration aux autres.
b) Quelques définitions de la chasteté
- Marc ORAISON : "le contrôle de la vie sexuelle"[9].
- Roger CANTIN : "la maîtrise du dynamisme sexuel"[10].
- Gilles CUSSON : "l'ordination de sa vie sexuelle"[11].
- Yves RAGUIN : "la rectitude en tout ce qui touche à l'instinct sexuel"[12].
- Claire DUMOUCHEL : "la maîtrise et l'utilisation de l'instinct sexuel dans la vie de tout être humain"[13].
- Xavier THÉVENOT : "une saine régulation de la sexualité"[14].
- Laurent BOISVERT : "la maîtrise libérante des pulsions sexuelles"[15].
- Bref, la chasteté est l'expression du respect que l'on a pour soi et pour les autres. (Yves Raguin
- « Devenir donc chaste ce n'est pas tenter d'éviter la sexualité, mais c'est chercher à bien l'assumer… L'effort pour devenir chaste cherche à user de la sexualité pour devenir plus homme ou plus femme (personne libre), en un mot pour augmenter le pouvoir relationnel qui est le nôtre », dit Xavier Thévenot.
c) Signification
- Si le célibat religieux est possible, il l'est parce que c'est possible d'être célibataire humainement.
- Le renoncement y est vécu non comme mutilation, mais comme dynamisme; non comme stérilité, mais comme intensification d'une donation concrète d'amour auquel on se sent appelé.
- Le mariage et le célibat sont deux réalités de la vie humaine.
- Ainsi, la valeur du célibat chrétien n'est pas le mépris de la réalité matrimoniale ou sexuelle en général, mais bien la personne du Christ et le but de sa vie : fondation et expansion du Règne. Un lien personnel avec le Christ et sa mission (cf. Mt 19, 12. Mc 10, 29. 1 Co 7, 32).
- En effet, l'amour du Christ et au Christ est le motif fondamental du célibat évangélique (‘à cause de moi et à cause de l'évangile' Mc 10, 29). N.B. Seul l'amour peut justifier le célibat en vue du royaume. (Dimension christocentrique)
- Le célibat en vue du Royaume veut être un service ecclésial de foi et d'amour, vécu dans l'espérance mise en Christ. (Dimension ecclésiale et apostolique)
- Le vrai et principal danger pour le célibat n'est pas seulement et n'est pas non plus avant tout l'impureté, mais le fait d'éteindre l'amour de Dieu et du prochain dans le cœur de la personne consacrée. Les manques contre la chasteté signifient que l'amour est en train de s'éteindre.
- Mariage et célibat en tant que chrétiens, vécus en grâce (foi, charité, espérance), sont un signe et une réalité eschatologique. (Dimension eschatologique)
d) Conditions d'un célibat authentique
- Le célibat n'est pas authentique parce que les religieux le vivent sans difficulté ni combats, sans blessures ni défaites, mais parce qu'ils l'harmonisent avec leur être, leur projet, la réalité évangélique sur laquelle il se fonde et à laquelle il conduit.
- Cette authenticité, toujours en devenir, est favorisée par la foi aux paroles du Seigneur, la confiance dans l'action de l'Esprit, la non-présomption de ses forces, la pratique de la mortification et de la garde des sens, l'usage des moyens naturels favorables à la santé du corps et de l'âme, l'éloignement de ce qui peut mettre en péril la chasteté (PC 12).
- Le célibat des religieux est et devient authentique à la condition d'être : choisi avec responsabilité, intégré au projet global, enraciné dans la foi, vécu devant Dieu, harmonisé avec la personne, incarné dans un milieu[16].
- Le choix responsable du célibat suppose la maturité psychologique et affective, une sérieuse expérience de Dieu et une connaissance normale de ce qu'on choisit.
5e Question d'approfondissement :
« Elle se refusera tout acte intérieur ou extérieur contraire aux sixième et neuvième commandements de Dieu » (c20). Où en es-tu ?
3.2. Quand naît une amitié privilégiée
a) Constat
- Depuis quelques années, constate Yves Raguin, le nombre d'hommes et de femmes consacrés à Dieu qui s'engagent dans de profondes amitiés augmente de plus en plus. Ils découvrent qu'ils sont toujours hommes et femmes et ne peuvent vivre sans amitié et sans amour[17].
- Nombreux sont ceux qui vivent leur célibat à contrecœur en se permettant des compromissions occasionnelles ; et nombreux sans doute aussi ceux qui ont choisi ce qu'ils appellent la "troisième voie", une vie quasi-conjugale qui n'est ni la voie de la chasteté totale ni celle du mariage.
- Beaucoup par contre vivent un célibat sans aucune compromission, mais qui les ferme et les rend incapables d'aimer.
- D'autres enfin, vivent leur vie consacrée dans la joie. Certains parmi eux ont peu à peu développé des amitiés soit avec des personnes de même sexe soit avec des personnes de l'autre sexe. Ces amitiés loin d'être contraires à la chasteté, en sont l'expression et permettent l'épanouissement d'un amour du Seigneur qui aurait été impossible sans elles.
- Le problème surgit dans l'amitié quand se fait jour un sentiment plus profond qui commence à créer un lien affectif.
- Une telle amitié peut être tout à fait dégagée de sensuel, mais elle peut aussi demander des manifestations d'affection qui la rendent moins libre. C'est ici que doit intervenir la chasteté.
- Nous rêvons parfois d'être des anges et d'aimer comme des anges. C'est un rêve qu'il faut bien vite chasser. Quand nous aimons, tout notre être est ému.
- Et pourtant, il est possible de vivre dans le célibat de grandes amitiés, dans une totale chasteté. Par ex. François de Sales et Jeanne de Chantal et tant d'autres dont on parle moins.
- Dans ce contexte, est chaste non pas la personne qui ne sait pas aimer, mais celle dont l'amour est tout libéré du charnel, de l'attachement sensuel et de l'égoïsme ; celle qui aime l'autre comme une personne, et non comme une possession, objet de plaisir ou de domination.
- Et pourtant il faut rester prudent, car celui que nous appelons l'ange de lumière (ou le démon de midi) peut nous faire croire que la chair est devenue pour nous sans danger.
b) Amitié privilégiée
- Elle peut être possible. Selon Xavier Thévenot, elle signifie « un lien affectif fondé sur la sympathie qui pousse à une communion profonde, tant dans le domaine des idées que dans celui des sentiments, et qui se traduit par une réciprocité réelle des confidences sur soi-même. Dans un tel lien, l'autre est objet d'attention privilégiée et source spécifique de joies et de préoccupations. De plus, les partenaires d'une telle amitié sentent que la force du désir sexuel n'est jamais totalement absente, même si elle est maîtrisée. »
- Comme toute autre réalité humaine, les amitiés privilégiées sont chargées d'ambigüité. Il arrive qu'elles soient surtout symptômes et occasions d'aliénation. C'est le cas si l'amitié s'installe dans une sorte de troisième voie entre le mariage et le célibat.
- Il arrive aussi qu'une amitié privilégiée représente une infidélité profonde bien qu'elle soit vécue dans une continence parfaite. Mais il est vrai aussi que certaines amitiés fortes s'accompagnent d'un processus libérateur de maturation des personnes.
c) Sens de responsabilité
- Etre vrai avec soi-même. Il faut le courage de regarder la réalité en face et de s'ouvrir à quelqu'un de compétent qui aidera à faire la lumière. Cela s'appelle opération vérité.
- Exercer sa responsabilité quant aux gestes. Un geste de tendresse engage en général plus qu'une simple parole, surtout si ce geste est précédé de paroles affectueuses réciproques.
- Vivre une certaine ascèse. Aimer conformément à l'Evangile exige toujours une certaine ascèse, une expérience de ruptures. Quand l'amitié menace la fidélité à Dieu, il faut utiliser des ciseaux pour l'arrêter, comme disait s. François de Sales.
- La décision de rupture suppose un équilibre humain suffisant de chaque personne qui permet d'affronter l'expérience crucifiante de la séparation.
d) Manques de chasteté
- La chasteté exigée à tous consiste à assumer une position libre et responsable devant sa propre sexualité, en la mettant au service d'un amour ordonné de soi, du prochain et de Dieu.
- Le critère d'évaluation des désordres moraux est toujours la valeur de l'amour qui exige le respect de soi et de l'autre, selon la loi naturelle et selon la foi.
- La morale chrétienne n'admet pas les rapports sexuels prénuptiaux et extra-matrimoniaux.
- Deux désordres moraux que la culture d'aujourd'hui voudrait faire croire qu'ils sont naturels : l'autoérotisme ou la masturbation (propre à l'adolescence) et l'homosexualité ou le lesbianisme, le saphisme.
6e Question d'approfondissement :
« Elle bannira toute relation incompatible avec son état de vie » (c25). Que pourrais-tu faire davantage pour que tes amitiés favorisent la fidélité à tes engagements ?
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4. Fidélité à la pauvreté libératrice
Méditation : Mc 6, 30-44
4.1. Pauvreté au service des pauvres
a) Donation au Christ l'unique nécessaire
- La pauvreté reconnue par Vatican II comme signe de la sequela Christi (PC 13a) est d'abord une question d'être que d'avoir.
- En effet, la pauvreté est avant tout une attitude de l'esprit (Mt 5, 3), un choix fondamental suscité par le contact avec le contenu de la foi.
- Du point de vue chrétien, cela signifie accueillir le Christ, se revêtir du Christ (Ga 3, 27), avoir les mêmes sentiments que lui (Ph 2, 5).
- On se met dans une attitude de donation et de dépendance à Dieu, d'abandon et de confiance inconditionnelle dans ses mains (Mt 6, 25-34) : pour moi, le Christ est l'unique bien nécessaire (cf. Lc 10, 42).
- Telle est la dimension christologique de la pauvreté.
- La pauvreté religieuse devient un apostolat, un service offert à tous.
- La vie de la religieuse devient un "service critique", un appel vers la transcendance.
- Grâce à la pauvreté choisie par motif de foi, la religieuse annonce aux uns que l'être compte plus que l'avoir, et aux autres que Dieu est le seul bien nécessaire qui peut répondre aux aspirations les plus profondes de l'humanité.
b) Disponibilité totale en faveur du Règne
- La mission est une manière de vivre la pauvreté (dimension ecclésiale de la pauvreté).
- La religieuse se sent appelée par l'Esprit à suivre le Christ (PC 13a) dans une vie de particulière disponibilité à Dieu et au service des frères et sœurs.
- L'attitude pratique de service et la pauvreté externe ne sont qu'une conséquence de cette réalité interne de disponibilité.
- La religieuse se dépouille de tout par imitation du Christ (Ph 2, 7).
- Dans cette optique, la vie religieuse devient un état de disponibilité, de service, de gratuité; un continuel appel à vivre en exode en s'appuyant sur l'espérance.
- Telle est la dimension eschatologique de la pauvreté. Détachement des biens temporels pour s'ouvrir à Dieu et aux frères : dimension fondamentale de la pauvreté évangélique.
- Ainsi, la pauvreté devient, en outre, une source de libération.
- La pauvreté est en fait un "se rendre libre-de pour être libre-pour".
- C'est une libération pour mieux aimer.
- La chose essentielle de notre pauvreté externe, c'est que notre personne est un bien pour les autres (disponibilité).
- Tout cela signifie qu'à la base de la pauvreté se trouvent la foi et la charité.
- La pauvreté est un témoignage de foi (Dieu est l'unique nécessaire) et un témoignage de charité (chrétien particulièrement disponible).
- Ainsi la religieuse devient-elle experte de communion.
c) Communication des biens
- Si les membres ne mettaient pas en commun les biens matériels et spirituels, la communauté cesserait d'être telle (aspect théologal).
- La mise en commun des biens est un effet et un signe de la communion spirituelle. Pauvreté, c'est aussi accueillir le cœur de l'autre, avec ses qualités et limites, savoir recevoir (et savoir donner ou partager).
- Cet esprit de pauvreté, disponibilité, détachement et communication des biens doit avoir un autre effet évangélique : se sentir proche des autres religieux, de la communauté chrétienne, du monde, des pauvres (PC 13a).
- Il faut une communication des biens qui ne ferme pas sur soi, mais qui ouvre à d'autres communautés ou Instituts suivant les caractéristiques de chacun.
- Il s'agit de se sentir effectivement à côté des nécessiteux, en les aidant à se libérer de leurs esclavages : évangélisation et promotion humaine.
- La force du vœu de pauvreté c'est d'être au service des pauvres.
d) Service de la prophétie et de la promotion humaine
- La personne consacrée doit être une prophétie vivante.
- Elle a fait des choix d'humilité, elle est un évangile vivant: elle conteste le monde et annonce la réalité du monde futur.
- Elle ne doit pas hésiter à marcher à contre-courant de la vie ordinaire.
- Quoiqu'il en soit, par son action l'Évangile vise à créer l'homme intégral, l'homme parfaitement humain, qui réalise toutes les dimensions de son être, spécialement la dimension plus profonde qu'est l'ouverture à Dieu.
- Cela suppose deux choses : une libération de tous les esclavages externes (misère, faim, esclavage politique, économique, etc.); mais la création intégrale suppose surtout la libération de l'homme de divers esclavages internes ou idoles.
- La personne consacrée, appelée par vocation à servir l'homme ou la femme, doit orienter son service vers ces deux objectifs. Elle doit aider les gens à se libérer de l'esclavage externe et interne[18].
- En d'autres termes, la personne consacrée doit être une éducatrice, une formatrice des consciences, une "constructrice" des hommes.
7e Question d'approfondissement :
« Chacune sera toujours prête à rendre compte des biens qu'elle a reçus et de l'usage qu'elle en a fait » (c32). Où en es-tu ?
4.2. Pauvreté et famille africaine
a) Constat
- La pratique du vœu de pauvreté, avouons-le sans ambages, est la plus grande cause de frustrations chez bon nombre de religieux négro-africains, motif de refroidissement des relations interpersonnelles dans la vie communautaire.
- Faut-il aider ou non sa famille dans le besoin ?
- Dans l'Évangile Jésus fait de vifs reproches aux pharisiens qui, au lieu d'aider leurs parents, prétendent donner la dîme au temple. Nous sommes confrontés à ce genre de problèmes, observe le Père Matungulu Otene[19].
- Bon nombre de nos familles connaissent une pauvreté qui frise la misère. Et notre vœu de pauvreté est loin de les convaincre, car aux yeux de bien des gens, ne sommes-nous pas des riches qui font semblant de mener une vie pauvre ?
- Comment dès lors vivre la pauvreté lorsque nous voyons la misère de ceux qui sont souvent la chair de notre chair, la vie de notre vie ? (Mc 7, 9-13).
- Dirons-nous donc que le religieux ou la religieuse, en faisant vœu de pauvreté acquiert le droit de ne plus se soucier de ses parents surtout quand ils croupissent dans la misère ? N'y a-t-il pas hypocrisie?
- Il n'est pas juste non plus de s'obstiner dans l'idée que tous les problèmes de notre famille trouvent solution dans la communauté.
- La pauvreté n'est pas misère, mais le vœu de pauvreté ne dit pas confort non plus; il exige un esprit de sacrifice et un style de vie simple.
b) Œuvrer pour le développement de l'Afrique
- La pratique du vœu de pauvreté pose surtout problème face à ceux qui voudraient dépendre de nous.
- En effet, mis à part l'égoïsme personnel, la pauvreté religieuse devient difficile en Afrique à cause de nos familles (au sens africain). Leur situation matérielle nous conditionne.
- Comment se débarrasser du parasitisme africain ?
- Puisque “la pauvreté évoque en Afrique une sous-humanité, une situation de permanente carence et humiliante privation qu'il importe de quitter”[20], nous pensons que l'Afrique a besoin de développement.
- Puisque la pauvreté religieuse ne nous ferme pas sur nous-mêmes, elle nous ouvre nécessairement à nos populations aux conditions vitales dérisoires. Il nous semble que la meilleure façon de vivre le vœu de pauvreté soit l'engagement concret à sortir notre peuple de la pauvreté tant matérielle que spirituelle.
- En effet, nos familles ont besoin de sortir de leur situation précaire pour une vie meilleure.
- Les religieux et religieuses doivent apprendre davantage à “se prendre en charge”, à travailler de leurs mains pour se nourrir.
- Et combien de fois n'abusons-nous pas de la bonne volonté des chrétiens en leur faisant perdre du temps par de longues célébrations liturgiques, des veillées de prières sans fruits, des réunions paroissiales stériles et des devoirs à domicile qui n'ont d'autre finalité que l'occupation inutile ?
- Il y a à craindre de cultiver sans cesse la paresse.
- Puisque la pauvreté, c'est aussi savoir partager ce qu'on possède avec ceux qui sont dans le besoin, nous devons mettre toute notre intelligence et notre savoir-faire au service de nos frères et sœurs.
8e Question d'approfondissement :
« Chacun des membres évitera de faire peser sur la communauté ses propres difficultés » (c57). Comment mets-tu en pratique cet article de vos Constitutions ?
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5. Fidélité à l'obéissance religieuse
Méditation : Mc 12, 28b-34
5.1. Obéissance comme une démarche personnelle
a) Signification
- L'obéissance religieuse est un mode particulier de vivre l'obéissance chrétienne, la recherche perpétuelle de la volonté de Dieu.
- Mais quelle est la particularité de l'obéissance religieuse face à l'obéissance chrétienne?
- À l'origine de l'autorité et de l'obéissance religieuse nous trouvons la communion de charisme et de vie, la fraternité pneumatique.
- De fait, à l'origine du groupe il y a l'appel de Dieu à vivre en communion le charisme en Église en développant un de ses aspects.
- Dans le service vers l'intérieur et vers l'extérieur se vit un rapport d'autorité et d'obéissance envers Dieu.
- Autorité et obéissance sont deux éléments complémentaires de la même participation de tous les appelés dans le même mystère du Christ.
- L'autorité et l'obéissance sont deux services en faveur de la communion (charité): les uns servent en commandant, les autres en obéissant.
- Et chacun est pour l'autre présence de Dieu (dans une relation réciproque).
- La spécificité de l'obéissance religieuse doit être cherchée dans le type de médiation avec laquelle la religieuse se sent appelée par l'Esprit à chercher et à accomplir la volonté de Dieu, et au concret dans la vie commune et dans la lecture de l'évangile.
- La religieuse se sent appelée à scruter, à discerner et à vivre la volonté du Père tout comme les autres chrétiens.
- Voilà pourquoi dans l'obéissance religieuse plus que du renoncement à la propre volonté, c'est un renoncement à la solitude, afin de vivre en communion avec les frères et sœurs que Dieu met à ma disposition pour découvrir ensemble sa volonté.
- Ma vie et ma volonté appartiennent aussi aux autres frères et sœurs.
- Ainsi, l'obéissance comme "conseil" ne naît pas de l'autorité, mais vient quand les appelés se mettent d'accord pour vivre en communion.
- C'est la communion qui donne naissance à l'obéissance.
- Dans la Tradition, la conception de l'autorité « représentant de Dieu », s'appuie sur la parole "qui vous écoute m'écoute..." (Lc 10, 16).
- Par conséquent, la responsable religieuse ne peut pas faire n'importe quoi de son désir parce qu'elle est autorité obéissante, guidée par la Constitution, le charisme, le Chapitre.
b) Obéissance comme démarche personnelle
- Dans la mentalité africaine, “l'obéissance est moins une démarche personnelle qu'une obligation sociale qu'on ne discute pas”[21].
- Les structures claniques et les initiations traditionnelles font que le jeune homme ou la jeune fille soit contraint d'obéir parce qu'il le faut, parce qu'il faut honorer la famille par sa bonne conduite même quand on ignore ce pourquoi on doit vraiment obéir.
- Le formalisme est la conséquence immédiate d'une telle situation.
- L'obéissance comme démarche personnelle doit être motivée par la docilité à Dieu par sa parole.
- Chacune devrait se dire j'obéis à Dieu et non pas aux hommes et aux femmes de ce monde.
- Même quand elle est seule, elle sentira le besoin de se conformer à la volonté de Dieu sans chercher à plaire à quelqu'un d'autre.
- La soumission à une supérieure n'est qu'un aspect ou un élément de l'obéissance qui, au sens profond, consiste à répondre à l'appel que Dieu adresse à chaque individu : “Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il renonce à lui-même” (Lc 9, 23).
- Pour cultiver ce genre d'obéissance, les communautés religieuses devraient souvent briser certaines structures, tel l'horaire de sorte que chacun des membres se conduise en toute conscience religieuse, sans être obligé par le son de la cloche.
- Le danger de grandes structures, c'est qu'en finissant la formation initiale on se dit "ouf!" s'en est fini ! On peut enfin respirer... Il s'ensuit le laisser-aller.
- La religieuse doit développer davantage la confiance en celles que Dieu met à sa disposition dans le but de discerner ensemble la volonté divine sur son projet de vie.
- Elle doit obéir effectivement en évitant le formalisme et l'hypocrisie, ou mieux les tendances tribaliste, régionaliste ou raciste.
- Mais pourquoi certaines personnes deviennent-elles désobéissantes comme si la vertu d'obéissance était inexistante dans la mentalité africaine ?
- Les réponses sont à chercher tant du côté de l'autorité que du côté du sujet[22].
c) Désobéissance par rapport à l'exercice de l'autorité
- La désobéissance arrive surtout quand il n'y a pas de dialogue constructif ou quand le dialogue ne change rien,
- quand l'autorité ne tient pas à sa parole ou cultive des injustices en choyant certaines personnes au point de fermer les yeux sur leur mal,
- quand elle exerce un certain néocolonialisme et quand elle n'a pas le sens du respect envers la personne humaine,
- bref quand l'autorité n'est pas “compétente” (sens du leadership).
d) Désobéissance par rapport à la pratique de la vertu
- La désobéissance arrive surtout quand la religieuse a perdu l'esprit d'abnégation qui aide à faire taire en soi la voix des passions et celle de la volonté propre (cf. Lc 9, 23);
- quand elle ignore ce pourquoi elle est entrée en religion et se laisse influencer par les tendances négatives de la société,
- bref quand la religieuse manque de motivation surnaturelle.
- En effet, nombreuses sont les personnes consacrées qui pensent que la démocratie supprime ou remplace leurs Constitutions voire l'Evangile.
- La vocation, redisons-le, suppose l'esprit de foi, l'engagement d'amour et l'esprit de sacrifice.
- L'obéissance n'est pas de faire ce qu'on aime mais ce qui est demandé par le Seigneur à travers les responsables. Le dialogue doit éclairer la décision à prendre et non pas faire ce que nous voulons.
9e Question d'approfondissement :
L'obéissance se vit en s'appuyant « sur les attitudes de l'Evangile qui sont un grand esprit de foi, l'humilité, la simplicité, la confiance et le renoncement » (c49). Où en es-tu ?
5.2. La volonté de Dieu
a) Constat
- Abordons une chose que je ne comprends pas moi-même !
- L'exercice de l'obéissance devient difficile quand nous cherchons à faire ce qui nous plaît et à vouloir que Dieu fasse notre volonté à nous plutôt que le contraire.
- Or ce qui nous plaît, c'est souvent le plaisir, et ce qui plaît à Dieu, c'est toujours le Bien. (Ex. infirme de la belle-porte).
- La religieuse ne pourra connaître cette volonté de Dieu qu'en faisant taire en lui la voix des passions et celle de la volonté-propre, en travaillant par la mortification à vaincre ses passions, ce que l'Apôtre appelle “la convoitise de la chair et la convoitise des yeux” (1 Jn 2, 16).
- Malheureusement dans bon nombre de situations, au lieu de chercher à résoudre les problèmes réels de leurs confrères ou consœurs, certains responsables se contentent de les flatter; d'autres ne s'arrêtent qu'à l'invitation à la prière “C'est la volonté de Dieu”, tel est le refrain le plus courant, employé souvent à tort.
- En effet, nous nous servons de cette expression à la fois pour rappeler que Dieu agit par son représentant et pour exprimer notre impuissance à maîtriser la situation du moment.
- Le dialogue des sourds nous pousse à le dire aisément. Cela arrive surtout quand les supérieurs ont décidé du renvoi de quelqu'un.
- Alors, la victime se demande comment le même Dieu qui a appelé hier pourrait se contredire aujourd'hui.
- C'est le dilemme de saint Bernard : “Ou le Christ se trompe ou le monde est dans l'erreur; or il est impossible que la divine sagesse se trompe...”[23].
- Il s'ensuit la méfiance envers ceux et celles qui “tiennent la place de Dieu”.
- La méfiance naît peut-être du fait de dissimuler la différence entre le double aspect sous lequel se présente la volonté de Dieu dans notre vie : volonté signifiée et volonté de bon plaisir de Dieu.
b) Compréhension
- Nous nous conformons à la volonté signifiée de Dieu quand nous sommes fidèles à quatre valeurs, à savoir : les commandements de Dieu et de l'Eglise, les conseils, les inspirations de la grâce et les Constitutions ou les livres de vie.
- Dieu VEUT que l'Homme soit heureux (BIEN).
- Le cheminement vocationnel pourrait se vérifier par la capacité d'être heureux dans la vie.
- Nous nous conformons à la volonté du bon plaisir de Dieu quand nous nous soumettons à tous les événements providentiels voulus ou PERMIS de Dieu pour notre sanctification.
- Nous pourrions nous inspirer de l'histoire biblique de Job.
10e Question d'approfondissement :
« La volonté de Dieu deviendra la nourriture pour sa vie » (c39). En quoi es-tu une personne heureuse ?
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6. Communauté source de fidélité
Méditation : Col 3. 12-18
6.1. Sens spirituel et religieux de la communauté
a) Evolution depuis Vatican II
- Il y a trois étapes de l'histoire récente de la communauté religieuse.
- La première étape est représentée par la découverte de la personne au sein de la communauté.
- La seconde étape commence à partir de 1968 avec intérêt à la communauté en tant qu'elle est fraternelle, un projet évangélique, lieu de partage de la foi, comme espace possible mais exigeant vécu dans la fatigue et l'espérance.
- La troisième étape, enfin, est marquée par la découverte de la réalité du monde et de ses problèmes et du lien entre communauté et monde des hommes[24].
- Bref, on est passé d'une communauté d'observances à une communauté de communion.
b) Signification
- La communauté se présente comme un don que Dieu nous fait, une bonne nouvelle pour l'Eglise et le monde, une mission pour les personnes consacrées, un lieu de croissance intégrale, à condition de se construire sur le Christ et que la prière imprègne sa vie, qu'il y ait partage de la foi et de la vie, un style de vie simple conformément aux vœux de religion, la vie de pardon et de réconciliation[25].
- Une communauté chrétienne authentique sous-entend les trois effets du baptême, à savoir : unir totalement la personne au Christ, l'insérer dans l'immense assemblée de fidèles qu'est l'Eglise (unité), et la faire participer activement à la mission de l'Eglise.
- Cela suppose la foi, l'espérance (joie) et la charité.
- La vie spirituelle[26] provient de Dieu, elle est reçue dans la foi et elle se manifeste dans l'amour et dans la joie.
- Cadre par excellence du radicalisme évangélique : le renoncement à soi, le portement de la croix et la sequela Christi (Mc 8, 34).
- Lieu caractérisé par “ l'être-ensemble ” au nom de Jésus-Christ : d'où l'engagement par vœux. Ceci n'est possible que pour qui se sent appelé ou qui a réellement la vocation.
- D'inspiration évangélique. “ Qu'ils soient un come Toi, Père, Tu es en moi… pour que le monde croie que tu m'as envoyé ” (Jn 17, 21).
- La communauté religieuse doit se distinguer par la fraternité, l'accueil, la communication, l'amitié, le dialogue, l'égalité, la mobilité.
- N.B. La profession religieuse est leur réponse à l'amour du Christ. Leur fidélité à cette consécration entraînera les croyants à vivre les exigences de leur vocation chrétienne et à désirer les biens du ciel.
- Lieu de communion fraternelle. La communauté de communion est celle caractérisée par l'authenticité des rapports humains, les partages de la foi (prière, eucharistie…)[27].
- En effet, “ le climat de charité fraternelle engendre la sincérité, l'ouverture, la confiance, le sens de l'amitié, le sens de responsabilité ”.
- Et puisque l'Eglise est essentiellement communion, les religieux veulent être une réalisation particulièrement intense de l'Eglise[28].
- Dans ce sens, la communauté religieuse est un signe particulièrement intense et permanent de cette communion ecclésiale, basée sur la Trinité.
- Aussi devient-elle, d'après Fabio Ciardi, un signe d'espérance pour l'Eglise et pour le monde, une tâche et un engagement pour les religieux[29].
- Voilà pourquoi nous disons avec Jean Vanier “ une communauté n'est une communauté que quand la majorité des membres est en train de faire le passage de la ‘communauté pour moi' à ‘moi pour la communauté' ”[30].
c) Quelques conditions de la charité
- L'Eucharistie. La participation authentique à l'Eucharistie est un signe d'unité, une réalisation d'unité et un appel à l'approfondissement de l'unité.
- La Prière. Là où les religieux ne prient pas sérieusement jamais on n'aura la charité authentique.
- Le respect des personnes. La personne humaine vaut plus que tout l'univers, que les idées, les opinions.
- La disponibilité à la croix. Jésus a réalisé l'unité entre Dieu et les hommes en mourant sur la croix. La charité sans sacrifice est illusion. L'unité est donc fruit de la croix, la croix de l'acceptation de l'autre, de sacrifier ses opinions.
- Le courage de commencer. Sans attendre l'autre, il faut le courage de commencer, de faire le premier pas sur le chemin de réconciliation.
- Le courage de continuer. Il ne suffit pas de commencer. Il faut en outre persévérer dans l'élan du bien, sans jamais s'arrêter en chemin[31].
11e Question d'approfondissement :
« C'est avec un regard de foi que les membres se regarderont et s'estimeront, dépassant ainsi toute considération purement humaine et naturelle » (c53). Comment se manifeste ton regard de foi ?
6.2. Lieu d'intersubjectivité et de croissance
a) L'être humain fait pour la communion
- L'être humain, homme ou femme, est fait pour la communion et il ne peut s'accomplir que dans une relation interpersonnelle authentique.
- De fait, en anthropologie philosophique, l'homme est un être relationnel. A l'instar de son Créateur, Amour dans la profondeur de son être, en ses trois personnes divines qui se regardent, s'ouvrent, se donnent, s'accueillent et vivent d'une seule vie (Jn 10, 30.38 ; 14, 9-10 ; 17, 20-23), l'homme en tant qu'être libre et responsable, doit créer la communion avec Dieu et avec ses semblables.
- Sa vraie identité, c'est la communion ou la solidarité.
- En effet, redisons-le, la communauté est le lieu où les membres vivent une profonde intersubjectivité par vocation, lieu de relations vraies, “ lieu privilégié de l'affrontement de l'autre en tant que ‘autre ‘, dans sa différence et dans sa spontanéité, capable de me mettre en question et de me révéler à moi-même en me promouvant ”[32].
b) Vivre de relations vraies
- La vérité de la relation interpersonnelle authentique se reconnaît, d'après Laurent Boisvert, à la présence simultanée de trois éléments relatifs à soi et à l'autre : la perception, l'acceptation et l'actualisation.
- La perception de soi et de l'autre. Une connaissance lucide et objective est indispensable à la relation vraie.
- Cette connaissance porte d'abord sur soi, car on ne peut percevoir l'autre dans sa réalité si on est incapable de se percevoir soi-même avec objectivité.
- Ai-je le courage de regarder mes forces et mes faiblesses ?
- Une connaissance objective de soi rend capable de porter sur l'autre un regard lucide.
- Mais cette perception est à la fois stimulante et souffrante.
- Seule est libératrice la perception juste et sereine de soi et de l'autre.
- L'acceptation de soi et de l'autre. Cette double acceptation est intimement liée : dans la mesure où on est capable de s'accepter soi-même, on devient capable d'accepter l'autre.
- Chacune doit donc tendre à l'accueil serein de son être total.
- Elle doit également accepter son être marqué par un passé qui, pour une large part, ne dépend pas d'elle : être né en ville ou à la campagne, dans un milieu riche ou pauvre.
- De plus, chacune doit accueillir l'autre inconditionnellement.
- Voilà qui fonde la capacité de vivre en communauté et la relation interpersonnelle authentique.
- L'actualisation de soi et de l'autre. Chacune aspire à être davantage, à s'accomplir au maximum.
- L'effort doit être orienté vers ce que chacune porte en elle et peut devenir. Si elle est heureuse de ce qu'elle peut être, satisfaite de devenir ce qu'elle est, elle actualisera ses potentialités dans la paix et la confiance.
- Elle s'aimera tel qu'ele est et comme Dieu l'aime.
- Elle ne cherchera pas à devenir ce que l'autre veut qu'elle soit pour échapper à ses propres différences.
- Cette attitude à l'égard d'elle-même la rend capable d'aider l'autre à devenir ce qu'elle peut être dans sa vérité propre.
- Agir ainsi, c'est vraiment aimer l'autre.
- Malheureusement, “ avec les meilleures intentions, on a parfois tendance à imposer à l'autre sa propre manière de voir, ses attitudes et comportements personnels… Aider les autres à être parfaitement eux-mêmes, si différents soient-ils de nous, voilà ce que signifie les aimer. Le contraire s'appelle aliénation ou destruction ”[33].
c) Quelques causes d'incompréhension
- Trois causes d'illusion méritent d'^tre mentionnées.
- La première, c'est que certains religieux pensent que la communauté est un endroit de sécurité. D'où la recherche acharnée d'une protection éphémère qui ne cultive que l'irresponsabilité.
- La seconde, c'est que d'autres pensent que la communauté est une réponse aux intérêts personnels. D'où la course parfois aux biens matériels pour soi ou pour sa famille.
- La troisième, enfin, c'est que d'autres encore croient que la communauté est un collectif d'uniformité et de nivellement. D'où l'obsession de se comparer aux autres, qui n'engendre que jalousie, inquiétude, complexes.
- Trois problèmes troublent également la vie communautaire.
- Tout d'abord la différence culturelle. Très souvent, le fait d'appartenir à différents groupes culturels ayant chacun sa façon de penser, d'agir et de concevoir les choses complique les rapports interpersonnels.
- Ensuite, l'agressivité. Ceux qui ne se sentent pas acceptés dans la communauté tendent à tout contester, ce qui est signe de personnalité non équilibrée totalement et de profonde insatisfaction devant la fonction à exercer.
- Et, enfin, la conflictualité. Les différences sociales et les différences des générations excitent souvent les membres d'une communauté à s'opposer les uns aux autres.
- Un constat évident, les jeunes de nos sociétés actuelles sont en relations conflictuelles avec leurs parents et leurs aînés.
- La modernité et la perte des croyances traditionnelles en Afrique ont suscité la crise de l'autorité.
- En effet, “ les jeunes se trouvent à l'étroit dans les anciens cadres qui freinent ou bloquent leur désir d'épanouissement ”[34].
- Aussi accusent-ils le passé d'être cause des malheurs du présent.
- Voilà qui explique la tendance au refus de l'autorité.
- Signalons, en outre, qu'il existe des conflits “ sans cause ” dans nos communautés.
- Ces conflits, souvent produits de l'aigreur, sont fréquents là où il y a des religieux et religieuses à problèmes.
- L'ouverture faisant défaut, il est difficile d'y envisager un quelconque remède.
- Ce genre d'attitude est dû à plusieurs facteurs dont voici les plus importants : manque de regard de foi (conversion), manque de motivation surnaturelle, manque de sincérité, sentiment de non-appartenance, bref, manque de maturité humaine.
d) Maturité humaine
- On sait que le diagnostic de la maturité psychologique est une opération extrêmement complexe.
- Mentionnons néanmoins quelques traits caractéristiques :
- la capacité de s'adapter à des conditions diverses et à des responsabilités déterminées, dans le contexte social où l'on se trouve ;
- la capacité de coopérer avec ses semblables et de se soumettre aux plans d'une autorité, dans le milieu familial et social ;
- la capacité de se spécialiser, et donc d'avoir confiance en ses propres ressources dans un champ d'action déterminé ;
- la capacité d'affronter de façon réaliste les problèmes de la vie par un contrôle approprié de ses propres impulsions[35].
- Ajoutons à tout cela la tolérance de la frustration et de l'ambiguïté des situations, l'acceptation du passé, la capacité d'attendre, la prise de conscience, etc. (selon F. Redl et D. Wiseman).
- Il s'ensuit que beaucoup de failles dans la vocation religieuse s'expliquent par l'immaturité des sujets.
12e Question d'approfondissement :
En toute sincérité, quels sont tes défauts et quelles sont tes qualités ?
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7. Etre des signes efficaces d'espérance
Méditation : Jn 15, 5-12
7.1. Signe et espérance
a) Un signe
- On appelle signe "ce qui, par rapport naturel ou par convention, fait connaître la pensée ou la volonté d'une personne, l'existences ou la vérité d'une chose”[36].
- En d'autres termes, un signe est une réalité sensible qui renvoie à une autre réalité. Auprès de qui la voit ou l'approche, la personne consacrée signifie une grande réalité de foi.
- Elle vit en vérité les engagements de la vie consacrée lorsque son style de vie correspond aux valeurs professées dans les vœux de religion et qu'elle fait sa part dans la mise en œuvre du projet missionnaire de son Institut.
- Le questionnement suscité dans le cœur de ceux et celles qui l'entourent est un véritable regard vers la source de toute vie et de toute vocation chrétienne.
b) La vertu d'espérance
- Parler de l'espérance, c'est dire la place que tient l'avenir dans la vie consacrée du peuple de Dieu, un avenir de bonheur auquel tous sont appelés (1 Tm 2, 4).
- Ce sont la confiance en Dieu et en sa fidélité, la foi en ses promesses, qui garantissent la réalité de cet avenir (cf. He 11, 1) et qui permettent au moins d'en deviner les merveilles.
- La participation à cet avenir indubitable reste problématique, car elle dépend d'un amour fidèle et patient qui est une exigence difficile pour une liberté pécheresse.
- Le croyant ne peut donc absolument pas se fier à lui-même pour atteindre à cet avenir. Il ne peut que l'espérer, dans la confiance[37].
- Par la foi l'homme trouve le chemin de la vraie vie, mais l'espérance seule l'y maintient.
- L'espérance est donc la véritable dimension de la foi; c'est la foi en marche vers son objet, un Dieu Seigneur du futur.
- C'est la vertu de l'homme en chemin vers la vie éternelle et qui, durant ce chemin, expérimente les difficultés de la vie et le risque de ne pas atteindre le terme désiré[38].
- En d'autres termes: l'espérance se développe en confiance dans la grâce de Dieu qui doit nous permettre de surmonter tous les obstacles.
- Dans notre situation africaine, la vertu d'espérance devient plus significative quand, face aux affrontements fratricides et meurtriers, face aux multiples souffrances et devant l'avenir parfois incertain, nous avons tendance à baisser les bras par découragement.
- C'est en fait là que la personne consacrée doit devenir un signe d'espérance par son engagement concret dans l'Église, sa capacité de créer l'amour et d'inventer de nouvelles façons de vivre.
c) Signe du Christ toujours Vivant
- La personne consacrée doit impérativement imiter trois traces du Christ si elle veut demeurer un signe efficace de sa présence permanente dans le monde.
- D'abord la personne consacrée doit être le reflet de la sainteté du Christ. Par les vœux, la vie consacrée "imite plus fidèlement et sans cesse représente dans l'Église le genre de vie que le Fils de Dieu a embrassé, quand il est venu dans le monde pour faire la volonté du Père, et qu'il a lui-même proposé aux disciples qui l'accompagnaient” (LG 44c.)
- Les personnes consacrées réactualisent la vérité de la chasteté du Christ, de sa pauvreté et de son obéissance dans l'Église.
- Ce qui ne signifie nullement “une négation des valeurs inhérentes à la sexualité, au désir légitime de posséder et de décider de sa vie de manière indépendante” (VC 87.)
- Ceux et celles qui acceptent ce genre de vie au contraire deviennent libres et plus ouverts à Dieu et au monde. (Capacité de bonnes relations).
- Puis la personne consacrée est le reflet de l'activité caritative du Christ.
- Grâce aux personnes consacrées l'Église manifeste le Christ soulageant les souffrances du monde, annonçant le Royaume, guérissant les blessés et nourrissant les affamés.
- Les vœux de religion les aidant à purifier le cœur et la liberté spirituelle éveillent la ferveur de la charité (LG 46.)
- Enfin la personne consacrée doit être le reflet de la grâce transformante.
- Les personnes consacrées sont pour tous les chrétiens des exemples suggestifs et transformateurs de vie.
- Leur vie spirituelle bien vécue fait grandir leur communauté chrétienne.
d) Signe de l'Église dynamique
- L'Église étant fondamentalement communion, les personnes consacrées sont au milieu du monde une manifestation de cette unité ecclésiale, ou mieux de l'Église dans sa double charité, envers Dieu et envers le prochain.
- Les personnes consacrées mettent tout en œuvre pour vivre leur unité de charité en entretenant des relations interpersonnelles profondes, dans la réciprocité d'amour motivé par un amour plus radical, celui pour le Christ.
e) Signe de la vie chrétienne authentique
- Les personnes consacrées veulent être une expression particulièrement intense de la vocation commune, celle baptismale.
- Il ne s'agit pas d'un super baptême duquel sortirait un super chrétien qu'on appellerait “personne consacrée”.
- Mais être personne consacrée, c'est répondre pleinement aux exigences de son baptême et de sa confirmation.
- Or, les chrétiens authentiques sont ceux que le désir de perfection habite.
- Tout l'effort de la vie des personnes consacrées ne devrait consister qu'à cultiver les vertus qui facilitent le progrès spirituel.
- Ainsi peuvent-elles guider spirituellement les autres chrétiens désireux de s'éloigner des “âmes médiocres”, comme le dit si admirablement Thérèse d'Avila, d'éviter le cercle de médiocrité.
- C'est un constat de première évidence. Notre société a certainement besoin de personnes consacrées “sincères, exigeantes envers elles-mêmes, capables de se constituer en signes purs et forts”.
- Elle voudrait surtout voir des personnes consacrées respectueuses et généreuses, capables d'accueillir l'autre dans sa liberté et sa différence, bref des hommes et des femmes aimés de Dieu et convertis.
- "A ceci tous vous reconnaîtront pour mes disciples: à l'amour que vous aurez les uns pour les autres”, dit Jésus à ses disciples (Jn 13, 35.) Tel est le sens profond de notre identité religieuse et missionnaire.
13e Question d'approfondissement :
A la lumière de ce que nous venons de dire, que dois-tu faire davantage pour que ta vie chrétienne soit vraiment authentique ?
7.2. Répondre aux attentes de l'Eglise (VC 109)
a) Bousculer son image
- Vouloir bousculer son image religieuse, c'est d'abord retrouver le sens spirituel de son engagement et correspondre aux attentes de l'Eglise.
- A ce niveau de notre retraite, laissons-nous bousculer par les attentes de l'Eglise en nous arrêtant au numéro 109 du document Vita Consecrata.
- S'adressant aux personnes consacrées, dans la conclusion de son Exhortation, Jean-Paul II exprime fortement ce que je considère comme attentes de l'Eglise.
b) Attentes
- Vivez pleinement votre offrande à Dieu, pour que ce monde ne soit pas privé d'un rayon de la beauté divine qui illumine la route de l'existence humaine.
- Les chrétiens (…) ont besoin de trouver en vous des cœurs purifiés qui «voient» Dieu dans la foi, des personnes dociles à l'action de l'Esprit Saint, qui marchent allègrement, fidèles au charisme de leur vocation et de leur mission.
- Vous savez bien que vous avez entrepris un chemin de conversion continue.
- Le monde et l'Église cherchent d'authentiques témoins du Christ. (NB. : Selon la Bible, le témoin authentique est celui qui a fait l'expérience de Dieu et s'est laissé bouleverser par cette expérience, qui parle courageusement de son expérience de Dieu aux autres et qui suscite des conversions).
- Dans l'Eglise et dans le monde, la vie consacrée a spécialement pour mission de rendre témoignage au Christ par la vie, par les œuvres et par la parole.
- Vous savez en qui vous avez mis votre foi (cf. 2 Tm 1,12): donnez-lui tout!
- Les jeunes ne se laissent pas tromper: venant à vous, ils veulent voir ce qu'ils ne voient pas ailleurs. Vous avez une responsabilité immense pour demain.
- L'amour passionné pour Jésus Christ attire puissamment les autres jeunes que, dans sa bonté, Il appelle à le suivre de près et pour toujours.
- Les hommes de notre temps veillent voir dans les personnes consacrées la joie qu'ils ressentent en étant avec le Seigneur.
- Personnes consacrées, aînées et jeunes, vivez la fidélité à votre engagement envers Dieu, en vous édifiant et en vous soutenant mutuellement.
- Vous avez la mission d'inviter de nouveau les hommes et les femmes de notre temps à regarder vers le haut, à ne pas se laisser envahir par les affaires de chaque jour, mais à se laisser séduire par Dieu et par l'Evangile de son Fils.
- N'oubliez jamais que vous, tout particulièrement, vous pouvez et vous devez dire non seulement que vous êtes du Christ, mais que vous « êtes devenus le Christ » (St Augustin).
14e Question d'approfondissement :
« Son cœur libéré de tout attachement devient capable d'un accueil fraternel, d'une écoute attentive et d'une aide désintéressée » (c33). Quels sont les attachements qui t'empêchent encore de te donner totalement au Christ ?
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8. Vers une nouvelle prise de conscience
Méditation : Lc 15, 11-32
8.1. Défis d'une éducation aux vertus humaines
- La prise de conscience est une des caractéristiques de la maturité humaine.
- Etre religieuse responsable, c'est entre autres, être capable de prendre conscience de la gravité de son choix de vie.
- Beaucoup de failles dans la vie consacrée s'expliquent par l'immaturité humaine des sujets.
- Il convient de prendre au sérieux l'éducation aux vertus humaines (psychologiques et morales) et à la maturation des sujets.
- "On ne peut pas être chrétiens et d'authentiques religieux si l'on n'est pas des hommes complets"[39].
- Entendons par vertu (virtus), la "disposition constante qui porte à faire le bien et à éviter le mal". Arrêtons-nous à quelques-unes.
a) Réflexion, équilibre et ordre
- Le choix responsable de la vie consacrée, redisons-le, exige à la fois la sagesse et un effort intellectuel indispensable, ou mieux une connaissance normale et suffisante de ce qu'on choisit[40].
- ? Entendons par réflexion, "l'action de réfléchir, d'arrêter sa pensée sur quelque chose pour l'examiner en détail... observation, critique adressée à quelqu'un"[41].
- Au plan de la vie religieuse, la réflexion est "la capacité de se soumettre avec intelligence aux autres, à ce que l'un pense, décide, dit, fait...
- L'ordre qui conduit à Dieu, disait saint Augustin, consiste entre autres à s'imposer ou imposer une discipline en soi-même ou autour de soi, à porter remède aux situations fâcheuses; à exprimer sa pensée avec cohérence, etc.
- Il nous faut l'esprit de leadership, la capacité d'organiser, de diriger et de commander quand il le faut pour le bien de l'Église entière[42].
- Cela suppose le temps de s'asseoir, de se concentrer, de méditer, de penser, de doser son imagination, de calculer les risques, etc.
- Dans la vie religieuse, c'est l'unique remède efficace contre l'impulsivité, l'impatience, l'improvisation.
- Rien de plus déconcertant que le fait d'agir avant de réfléchir, de travailler sans moindre planification.
b) Intuition et compréhension
- L'intuition (de intus: dedans), c'est "la saisie immédiate de la vérité sans l'aide du raisonnement. La faculté de prévoir, de deviner".
- C'est la capacité de lire dedans les personnes, les événements, les circonstances... sans recourir aux longs raisonnements.
- Tandis que la compréhension est "cette vertu qui me pousse à comprendre l'autre, à lire du dedans ses exigences et ses problèmes, à me mettre dans sa peau, à m'engager pour lui".
c) Prudence et contrôle de soi
- Le témoignage prophétique ne peut se réaliser valablement sans la prudence, "l'attitude qui consiste à peser à l'avance tous ses actes, à apercevoir les dangers qu'ils comportent et à agir de manière à éviter tout danger, toute erreur, tout risque inutile".
- Il ne peut non plus se réaliser sans un véritable contrôle de soi, la caractéristique de l'homme qui a atteint l'auto possession.
- L'homme mature réussit à penser, aimer, décider, vivre selon les exigences de la raison et de la foi, sans se laisser déranger par les personnes, les choses, les circonstances, les états d'âme, les passions.
- D'où la nécessité de former aussi à la maîtrise de soi qui se manifeste dans la douceur que st Paul qualifie de fruit de l'Esprit (cf. Gal 5, 23).
d) Loyauté, respect et confiance
- Une des merveilles apportées par l'évolution du Concile Vatican II, c'est la découverte de la personne au sein de la communauté.
- "Chaque personne en tant que créature image de Dieu, vaut plus que tout l'univers et est digne d'estime et de respect même si ses idées sont fausses, même si son comportement est répréhensible".
- Le respect nous aide à ne pas sous-estimer les autres.
- La consacrée a aussi besoin de la confiance. Car, en pédagogie, "on ne peut pas éduquer si l'éduqué se rend compte que l'éducateur n'a pas confiance en lui",
- Entendons par confiance "le sentiment de sécurité de celui qui se fie à quelqu'un, à quelque chose... sans crainte d'être trompé, sans hésiter, en toute sûreté".
- C'est la vertu qui nous pousse à nous confier aux autres, à leur bonté, à leur possibilité de récupération.
- Par loyauté, "test de la valeur humaine d'une personne et du respect que cette personne a envers les autres", l'homme maintient la parole donnée.
e) Courage et patience
- Le courage est la vertu humaine "qui m'aide à affronter, avec calme et sérénité, les situations difficiles de la vie", t
- tandis que la patience "me pousse à supporter avec grande sérénité intérieure et grand calme extérieur les adversités qui proviennent des situations ou des personnes".
- Le courage suppose équilibre, conviction, constance, confiance dans ses propres idéaux,
- alors que l'impatience est symptôme d'immaturité, de vulnérabilité, de fragilité intérieure, de non acceptation de la réalité, de non acceptation de l'autre.
f) Sincérité, ouverture, confidence
- La sincérité consiste à ne pas dire ce qui est faux et à ne pas se comporter faussement.
- L'ouverture consiste à ouvrir les secrets de son cœur à la personne qui mérite notre confiance.
- Tandis que la confidence consiste à ouvrir les secrets de son cœur à une personne à qui on se confie en profondeur. C'est la vertu des amis.
g) Accueil, capacité d'écoute, discrétion
- De la qualité de l'accueil dépend la qualité de dialogue.
- Il ne faut jamais ignorer les trois lois du dialogue qui sont: savoir écouter, reconnaître l'autre comme un interlocuteur valable, et répondre "au vrai de la demande".
- Sans cela, il est difficile de discerner ensemble la volonté divine sur chacun.
- Mais concrètement combien savent écouter ?
- Pour y arriver, il faut écouter humblement, patiemment, avec tout son cœur et en "renonçant à son esprit propre et à toute théorie, sinon on n'écoute pas, mais on interprète, on transforme".
- La discrétion consiste "à garder les confidences reçues ou à ne pas propager, sans motif, paroles, actions ou faits dont la conscience pourrait causer dommage chez quelqu'un".
h) Simplicité et sens de responsabilité
- La simplicité suppose le sens de responsabilité dans la communauté, l'usage de la liberté intérieure pour son vrai bien et le bien des autres.
- Ainsi vouloir maintenir les sujets dans la condition de minorité psychologique et morale, de manière à ne pas parvenir à gérer leur propre vie, est une atteinte grave à la dignité humaine.
- Le mieux serait que la formation rende la personne capable d'agir de manière responsable en fonction de sa croissance et de celle d'autrui.
- La simplicité attire.
i) Douceur, beau trait, sourire
- Dans la personne mûre, la douceur, le beau trait, le sourire sont l'expression spontanée d'un amour mûr, c'st-à-dire oblatif.
- Chez les responsables de communautés, l'absence de ces trois vertus qui ont une grande valeur de témoignage ne favorise guère le rapprochement les uns des autres.
15e Question d'approfondissement :
Parmi les vertus dont nous venons de parler, lesquelles reconnais-tu en chacune des sœurs de ta communauté ?
8.2. Vivre en femme réconciliée
a) Examen de conscience
b) Célébration de la réconciliation : Ap 3, 20
16e Question d'approfondissement :
A la lumière de cette retraite, quel est l'état de santé de ta vocation ? En quel domaine aurais-tu besoin de la miséricorde divine ?
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